Il était une fois une petite fille de Village, la plus jolie qu’on eût su voir ; sa mère en était folle, et sa mère-grand plus folle encore. Cette bonne femme lui fit faire un petit chaperon rouge, qui lui seyait si bien, que partout on l’appelait le Petit Chaperon rouge. Il était une fois trois petits cochons qui vivaient avec leur maman dans une petite chaumière. Un jour, La maman appela ses trois fils et leur dit qu'elle ne pouvait plus les élever parce qu'elle était trop pauvre. Je voudrais que vous partiez d'ici et construisiez votre maison, dit-elle, mais prenez garde qu'elle soit bien solide pour que le grand méchant loup ne puisse entrer et vous manger. La maman embrassa ses trois petits cochons et leur dit au revoir les larmes aux yeux. Ils s'en allèrent de chez eux construire leurs maisons. Un jour, sa mère, ayant cuit et fait des galettes, lui dit : Va voir comme se porte ta mère-grand, car on m’a dit qu’elle était malade. Porte-lui une galette et ce petit pot de beurre. Le Petit Chaperon rouge partit aussitôt pour aller chez sa mère-grand, qui demeurait dans un autre Village. En passant dans un bois elle rencontra compère le Loup, qui eut bien envie de la manger ; mais il n’osa, à cause de quelques Bûcherons qui étaient dans la Forêt. Il lui demanda où elle allait ; la pauvre enfant, qui ne savait pas qu’il est dangereux de s’arrêter à écouter un Loup, lui dit : Je vais voir ma Mère-grand, et lui porter une galette, avec un petit pot de beurre, que ma Mère lui envoie. Demeure-t-elle bien loin ? lui dit le Loup. Oh ! oui, dit le Petit Chaperon rouge, c’est par-delà le moulin que vous voyez tout là-bas, à la première maison du Village. Eh bien, dit le Loup, je veux l’aller voir aussi ; je m’y en vais par ce chemin-ci, et toi par ce chemin-là, et nous verrons qui plus tôt y sera. Le loup se mit à courir de toute sa force par le chemin qui était le plus court, et la petite fille s’en alla par le chemin le plus long, s’amusant à cueillir des noisettes, à courir après des papillons, et à faire des bouquets des petites fleurs qu’elle rencontrait. Le premier petit cochon rencontra un homme portant une botte de paille. - "Puis-je avoir un peu de paille pour construire ma maison ?" demanda le petit cochon. Et l'homme lui donna de la paille. Le loup ne fut pas longtemps à arriver à la maison de la Mère-grand ; il heurte : Toc, toc. Qui est là ? C’est votre fille le Petit Chaperon rouge (dit le Loup, en contrefaisant sa voix) qui vous apporte une galette et un petit pot de beurre que ma Mère vous envoie. La bonne Mère-grand, qui était dans son lit à cause qu’elle se trouvait un peu mal, lui cria : Tire la chevillette, la bobinette cherra. Le Loup tira la chevillette et la porte s’ouvrit. Il se jeta sur la bonne femme, et la dévora en moins de rien ; car il y avait plus de trois jours qu’il n’avait mangé. Ensuite il ferma la porte, et s’alla coucher dans le lit de la Mère-grand, en attendant le Petit Chaperon rouge, qui quelque temps après vint heurter à la porte. Toc, toc. Le second petit cochon avait rencontré un homme qui portait un chargement de bois. - "Puis-je avoir quelques bouts de bois pour construire ma maison ?" demanda le petit cochon. Et l'homme lui donna le bois. Qui est là ? Le Petit Chaperon rouge, qui entendit la grosse voix du Loup eut peur d’abord, mais croyant que sa Mère-grand était enrhumée, répondit : C’est votre fille le Petit Chaperon rouge, qui vous apporte une galette et un petit pot de beurre que ma Mère vous envoie. Le Loup lui cria en adoucissant un peu sa voix : Tire la chevillette, la bobinette cherra. Le Petit Chaperon rouge tira la chevillette, et la porte s’ouvrit. Le troisième petit cochon, lui avait rencontré un homme chargé de briques. S'il vous plaît, Monsieur, demanda le troisième petit cochon, puis-je avoir quelques briques pour construire ma maison ? L'homme lui donna assez de briques pour bâtir une grande et solide maison. Le Loup, la voyant entrer, lui dit en se cachant dans le lit sous la couverture : Mets la galette et le petit pot de beurre sur la huche, et viens te coucher avec moi. Le Petit Chaperon rouge se déshabille, et va se mettre dans le lit, où elle fut bien étonnée de voir comment sa Mère-grand était faite en son déshabillé. Elle lui dit : Ma mère-grand, que vous avez de grands bras ? C’est pour mieux t’embrasser, ma fille. Les trois petits cochons rentraient joyeusement chez eux quand le grand méchant loup les aperçut. "Comme ils doivent être tendres! Lequel vais-je manger en premier ? Je vais commencer par le petit cochon dans la maison de paille !" Il frappa à la porte. Petit cochon, gentil petit cochon, laisse moi entrer ? Non, Non ! Par le poil de mon petit menton ! Alors, je vais souffler et ta maison s'envolera! Le loup gonfla ses joues, souffla, souffla de toutes ses forces, et la maison de paille s'envola. Au secours ! Cria le premier petit cochon en courant vers la maison de bois de son frère. Ma mère-grand, que vous avez de grandes jambes ? C’est pour mieux courir, mon enfant. Ma mère-grand, que vous avez de grandes oreilles ? C’est pour mieux écouter, mon enfant. Ma mère-grand, que vous avez de grands yeux ? C’est pour mieux voir, mon enfant. Ma mère-grand, que vous avez de grandes dents. C’est pour te manger. Et en disant ces mots, ce méchant Loup se jeta sur le Petit Chaperon rouge, et la mangea. A peine celui-ci eut-il refermé la porte que le loup frappa. Petits cochons, gentils petits cochons, laissez moi entrer ? Non, non! Par le poil de nos petits mentons! répondirent les deux frères. Alors, je vais souffler, souffler, et votre maison s'envolera! Le loup se gonfla les joues, souffla, souffla de toutes ses forces, et la maison de bois s'envola. Au secours ! crièrent les deux petits cochons en courant aussi vite que possible vers la maison de briques de leur frère. Ici, vous ne risquez rien! leur dit-il. Bientôt, la voix du loup résonna. "Petits cochons, gentils petits cochons, je peux entrer ?" Non! non! Par le poil de nos petits mentons ! Alors, vous allez voir, hurla le loup, je vais souffler sur votre maison, et je vais la démolir ! Il prit alors sa plus profonde respiration et souffla comme un fou. Mais cette fois-ci, il ne réussit pas à mettre la maison par terre. Cela rendit le loup fou furieux. Il décida de passer par la cheminée de la petite maison. Pendant ce temps, le troisième petit cochon, qui était très rusé, alluma un grand feu dans la cheminée et y posa un chaudron rempli d'eau. Quand le loup descendit dans la cheminée, il tomba tout droit dedans. Il poussa un hurlement qu'on entendit à des kilomètres à la ronde et repartit comme il était venu, par la cheminée. On n'entendit plus jamais parler de lui.